La montagne, c’est aussi de belles lectures ! J’aimerais vous partager ici quelques livres que j’ai découverts ces dernières années, en plus de ceux que j’ai pu dévorer quand j’étais jeune.
Les Alpes Occidentales de Raoul Blanchard. Une dizaine de volumes, c’est ce qu’il faut à ce géographe grenoblois (d’adoption) pour nous présenter une géographie de la chaîne alpine française. Ecrite entre le début des années 1940 et celui des années 1950, cette « encyclopédie » est un bon exemple de géographie de l’école vidalienne où l’auteur étudie les aspects physiques mais aussi les « genres de vie » humains de chaque massif. Au gré de ses propres explorations, dans un style très littéraire et jamais ennuyeux même dans des sujets a priori austères, Blanchard nous emmène en sortie terrain.
Blanc de Sylvain Tesson. Après La Panthère des Neiges et son voyage Sur les Chemins noirs, Sylvain Tesson nous raconte sa traversée intégrale des Alpes à ski, accompagné d’un ami guide de haute montagne, réalisée en plusieurs hivers. Comme souvent chez cet auteur, plus qu’un carnet de route ou de voyage, on trouve aussi des réflexions littéraires, philosophiques, ou plus légères, au gré des paysages, de la météo, des rencontres réalisées en route. Comme quoi, marcher en montagne peut -en plus du sport- s’avérer propice à la méditation.
Encordé mais libre, de Patrick Berhault. Au tout début du IIIème millénaire, le célèbre grimpeur et alpiniste Patrick Berhault réalise, partiellement seul, une traversée intégrale des Alpes en passant par les plus hauts sommets de la chaîne, et en grande partie en hiver. A travers ce carnet d’expédition, l’auteur nous décrit ses aventures avec ses moments de préparation, de doutes, d’exaltation, de galères… Plus qu’un exploit solitaire, il nous fait plusieurs fois part de son souhait d’impliquer dans son aventure d’autres alpinistes qui l’accompagnent dans certaines ascensions. Comme il le dit lui-même, le monde de l’alpinisme et de la montagne est comme une grande « cordée » où la camaraderie, l’entraide et le partage d’une même passion sont des valeurs fortes.
Christine Janin, dame de pics et femme de cœur, de Christine Janin (avec la collaboration de Véronique El Baze). Voilà encore une alpiniste (mais pas que) qui nous livre un témoignage vivant et exaltant d’une vie tournée non seulement vers l’aventure, mais aussi vers les autres. De la première femme française au sommet de l’Everest dans les années 1980, à la fondatrice de l’association A Chacun son Everest à Chamonix, qui propose des séjours à la montagne à des enfants et des femmes en rémission du cancer et de la leucémie, on suit cette vie étonnante où tout n’a pas été facile pour autant. Une sacrée dame !
Le Sommet des dieux, de Baku Yumemakura et de Jirô Taniguchi. Adapté d’un roman, ce manga japonais en cinq volumes nous plonge dans le monde de l’alpinisme conquérant, mais vu du Japon. On suit une intrigue passionnante qui part de l’ascension controversée de Mallory au début du XXème s. et qui nous entraîne dans un labyrinthe de passions, de haines et d’amitiés, d’abnégation et de fragilités humaines, dans les montagnes d’Asie et d’Europe. A remarquer évidemment les magnifiques dessins de ce manga, faisant de la montagne l’un des personnages principaux de cette histoire.
La Provence avec les yeux de Giono, de Dominique Le Brun et Jean-Christophe Pratt. Organisé comme un guide touristique, avec une première partie présentant les grandes lignes de la vie de l’écrivain Jean Giono, ce livre déjà un peu ancien nous propose des itinéraires à travers la Haute Provence. On passe par les lieux qui ont (ou auraient, car Giono avec une conception assez baroque de la géographie) inspiré l’écrivain dans ses principaux romans. Une façon originale de voyager, même en imagination, dans ces arrière-pays qui ont peu perdu de leur caractère. Après tout, Jean Giono lui-même ne concevait-il pas certains de ses romans avec la carte d’état-major sous les yeux ?
La Montagne de Lure, numéro spécial de la revue régionale Alpes de Lumière dirigé par Guy Barruol. Encore un aperçu d’une belle montagne de Haute Provence, vue de façon encyclopédique et sous tous les angles : nature, Histoire, mise en valeur d’hier et actuelle, aspects géographiques… Des images magnifiques et pour certaines d’époque, un texte à la fois accessible mais détaillé : bienvenue aux portes de la Provence des « hautes terres », chantée par Jean Giono et par tant d’autres.
Fréjus-Lavoir, hommes et fortifications (1891-1945), de Laurent Demouzon. Lorsqu’on se promène dans les montagnes dominant Modane et la vallée de la Maurienne, et qui jouxtent la frontière italienne, on ne se rend pas forcément compte qu’on côtoie une époque où des militaires patrouillaient ces lieux parfois peu hospitaliers. Au col du Fréjus par exemple, ou parfois même sur des cimes approchant voire dépassant les 3000 m d’altitude, des hommes ont gardé et à plusieurs reprises défendu la frontière en bravant le froid, les avalanches, sans parler des dangers issus des troupes ennemies. Ce livre retrace ce gros demi-siècle d’Histoire, à l’aide de documents très nombreux et éloquents, de témoignages, d’anecdotes parfois savoureuses, mais aussi de drames. Montagne, terre des Hommes !
Accident à la Meije, d’Etienne Bruhl. Qui a dit qu’un polar ne se déroule que dans les villes et que l’intrigue est forcément résolue par un détective ou un inspecteur ? Pionnier en la matière, Etienne Bruhl nous propose une véritable enquête digne de Sherlock Holmes ou de Jules Maigret, mais au cœur des montagnes de l’Oisans et des Ecrins. Des personnages hauts en couleur, une disparition louche et une foule d’indices nous guidant parfois sur de fausses pistes, de beaux sentiments aussi… sur les arêtes de la Meije mais également aux périphéries de l’Europe. En prime, un beau témoignage sur ce massif sauvage que l’auteur a arpenté, sans doute dans les années 1930.